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VU À L'ÉTRANGER ADW Agro : posséder la terre pour être rentable

« En cinq ans, nous avons doublé nos tonnages de céréales et la production laitière. »Petr Kuba, l'un des deux actionnaires d'ADW Agro.C. DEQUIDT

En République tchèque, les distributeurs cherchent à acheter la terre pour conforter leur business. ADW Agro qui exploite une ferme de polyculture-élevage, témoigne.

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ADW Agro est un modèle de la nouvelle vague d'agrodistributeurs qui ont réussi, après la chute du régime communiste fin 1989 et l'avènement de la République tchèque. Créée en 1991, l'entreprise s'est d'abord spécialisée dans le trading de matières premières (végétales et animales), la vente d'intrants, la fabrication d'aliments, l'énergie avec la méthanisation et la distribution de matériels John Deere. Très rapidement, ADW Agro voudra être à la tête d'une structure de production.

L'inorganisation après quarante-cinq ans de communisme, le manque de savoir-faire et d'expérience et la mauvaise gestion entraînent de nombreuses faillites dans les coopératives de production ou chez les agriculteurs qui ont récupéré leur terre. En parallèle, la distribution s'organise (lire encadré). Des holdings privées voient le jour et vont racheter systématiquement le capital social des entreprises en difficulté, pour en faire des fermes de polyculture-élevage où elles puisent une partie de leurs matières premières. En moins de dix ans, elles vont en faire des exploitations performantes et compétitives, pouvant parfaitement rivaliser avec les structures françaises. Leur seul problème est que les agriculteurs actionnaires des coops souhaitent, en grande majorité, garder la propriété de leurs terres.

« En 2008, nous avons racheté les parts de la coopérative Rolnicka Spolecnost, à Lesonice. Une ferme qui exploitait 2 500 ha et 250 vaches laitières en production, témoigne ainsi Petr Kuba, l'un des deux actionnaires d'ADW Agro. En cinq ans, nous en avons fait un outil agro-industriel en doublant les surfaces et le tonnage mis en vente en céréales, la production laitière et le nombre de vaches, en investissant dans un méthaniseur de 2 MW et... en diminuant le personnel par trois. »

Une croissance continue, loin d'être terminée

« Nous avons un défi majeur, poursuit-il, qui consiste à mieux gérer nos structures de base avec une comptabilité analytique et un vrai calcul des coûts. Par exemple, la décision a été prise de limiter l'achat à deux moissonneuses-batteuses et de louer les services de dix autres durant la moisson ou encore de sous-traiter les semis de maïs. »

Mais pour Petr Kuba, l'étape la plus importante reste à venir. L'enjeu, aujourd'hui, est d'acheter la terre et d'augmenter considérablement le cheptel pour le passer à 1 500 vaches. « Toutes les holdings ont une fragilité, car elles n'ont pu acquérir que les actions dans les coopératives de production, et pas le foncier dont 90 % est encore dans les mains des petits actionnaires. Si un autre distributeur ou investisseur arrive à les séduire, c'est plusieurs années d'effort que nous perdons. » Un indice qui ne trompe pas, le prix des terres ne cesse d'augmenter.

Les bienfaits de l'Europe

Enfin, « même si elle nous apporte quelques tracasseries, l'Europe a été une opportunité formidable pour des structures comme les nôtres, confie Petr Kuba. Il faut être astucieux et profiter des aides, en combinant celles de notre pays, comme pour le méthaniseur, et les aides européennes, notamment dans la réfection des bâtiments d'élevage, la construction de silos ou les primes à l'hectare ». De nombreuses coopératives de production ne survivent d'ailleurs que grâce à cette manne. Une situation qui ne pourra pas durer bien longtemps. Ce sont les cibles aujourd'hui des holdings comme ADW Agro.

Christophe Dequidt

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